Le scandale des prix de l’immobilier et de la propriété lucrative.
Pour garantir une vie heureuse et la liberté face à l’esclavagisme financier, l’accès au logement est une condition sine qua none et devrait être un droit fondamental inclus dans la constitution. Or, force est de constater qu’aujourd’hui l’accès à un logement n’est pas garanti à tout le monde. Selon la fondation Abbé Pierre, en France, 3,6 millions de personnes sont privées de domicile personnel. 2 880 000 personnes vivent dans ces conditions de privations de confort ou de surpeuplement et 895 000 personnes sont soit sans logement ou en situation d’occupation précaire (hôtel, caravanes…).
Mais même pour ceux qui ont un logement, le coût à payer reste énorme. En France en 2017, 40% des gens sont locataires et le coût moyen du logement en 2016, se situe à 26,2 % du salaire des français. Il leur faut donc en moyenne travailler plus de 3 mois par an pour avoir le droit de se loger. Ce chiffre est proprement scandaleux, car cela ne reflète en rien le coût réel de la fabrication et de l’entretien du logement, et ceci est dû au fait qu’une partie de la population tire profit du travail des autres.
La question suivante est légitime et rarement posée : est-il légitime de gagner une grosse partie du salaire d’un autre citoyen en louant un bien, c’est-à-dire de l’exploiter en profitant de l’intérêt du capital sans réellement créer de valeur? Pourquoi les prix de l’immobilier sont-ils aussi élevés et déconnectés de toute valeur réelle? Pourquoi se loger coûte-t-il une fortune sur Paris ou Londres, et pourquoi est-ce plus accessible dans le Cantal ou dans la Creuse?
Le mécanisme en jeu est la loi de l’offre et de la demande. Paris est une ville plus attractive en raison des offres d’emploi, de la vie culturelle, des loisirs, de sa beauté… On a donc beaucoup plus de gens prêts à payer plus cher pour venir s’y installer. On a d’ailleurs plus de demande que d’offre, et donc les propriétaires peuvent toujours fixer les loyers de plus en plus haut car ils seront sûrs d’avoir quelqu’un prêt à payer cette somme. Cependant cette négociation n’est jamais juste. En effet, dans de nombreux cas c’est une négociation avec un pistolet sur la tempe. Personne n’a envie de dormir dehors, et que ce soit dans la Creuse ou à Paris, les propriétaires vont naturellement fixer le prix le plus haut possible que la personne est prête à payer pour ne pas être à la rue. Le loyer ne reflète pas une vraie valeur économique. Les prix des loyers se fixent donc naturellement en fonction des masses salariales des locataires. Si demain tout le monde percevait 1000€, voire même 2000€ ou 5000€ de revenu de base minimum, les gens seraient toujours pauvres. En effet, les prix des loyers augmenteraient de la même manière puisqu’il y aurait toujours quelqu’un prêt à payer avec ces revenus en apparence plus importants pour ne pas dormir dehors. On a pu notamment voir que les prix des loyers ont augmenté de plus de 30% depuis l’an 2000.
Nous ne cherchons en rien ici à stigmatiser les propriétaires qui louent leur bien où qui les vendent au prix (aberrant) du marché. Ce sont souvent des personnes honnêtes qui cherchent simplement à faire fructifier leur capital. Bien que celui-ci ait pu souvent être gagné sans effort par l’héritage, il a pu aussi être le fruit de nombreuses années de travail. Comme le système actuel incite à la location, ils font comme tout un chacun, et louent leur bien dans l’espoir d’en tirer un petit pécule pour vivre plus confortablement. Le propos ici n’est pas de donner tort à des individus, mais plus à prendre de la hauteur sur le système actuel. La propriété lucrative est tellement ancrée dans les mœurs qu’on ne la remet jamais en question et qu’on ne réfléchit pas à ses implications. Il faut être honnête avec soi-même. Si quelqu’un perçoit 4% d’intérêts en plaçant 1 million d’euros sur des actions, il gagnera 40 000€ à la fin de l’année sans rien faire. Mais cet argent ne viendra pas de nulle part. Il aura été prélevé du chiffre d’affaires et retiré du salaire des employés. C’est-à-dire que le propriétaire lucratif aura gagné de l’argent sur le dos d’autrui.
Lorsqu’un propriétaire loue son logement l’équivalent d’un SMIC à Paris, il aura gagné cet argent sans avoir fait d’effort sur le travail d’un autre citoyen. Certaines personnes croient à tort que c’est la rétribution d’un effort, comme le fait de construire le logement, de chercher à le louer, de faire les papiers administratifs etc. Dans les faits, le logement était déjà souvent construit avant, et la valeur de construction n’est pas inexistante, c’est ce que l’on nomme la valeur cadastrale qui mérite en effet une rétribution dans une logique capitaliste, c’est une prestation de service, mais qui est bien inférieure au montant des loyers actuels. Les salariés eux aussi font ces efforts gratuits pour trouver un emploi, comme faire des études, rédiger un CV, passer des entretiens d’embauche, avant d’avoir gagné le moindre euro. Il ne faut pas confondre la recherche et la production de valeur.
Il est important aussi de comprendre qu’une aide comme les APL n’est pas une aide destinée au pauvre, c’est une aide qui va enrichir les propriétaires. En effet, elle ira toujours dans leur poche et leur aura permis de fixer les prix des loyers à un niveau plus élevé puisque les gens ont plus pour dépenser.
Au final, le constat est le suivant : beaucoup de personnes souffrent aujourd’hui de mal logement ou de l’esclavagisme financier du pistolet sur la tempe que sont les prix de l’immobilier. Il est temps de crever cet abcès, mais il faut aussi ne léser personne. En effet, si un propriétaire touche un loyer qui lui permet de nourrir ses enfants et de leur payer des études, ce ne sera pas productif de l’interdire. C’est que la société ne lui fournit pas assez en retour pour vivre décemment et il se retrouve obligé de prendre aux autres. Il faut une transition qui accompagne tout le monde et qui tire la société vers le haut.
Le fait de construire progressivement des nouvelles villes écologiques sans voitures où les logements seront mis à disposition gratuitement permettra de réduire cette pression financière de l’immobilier. Comme il y aura plus de logements, les prix de l’immobilier vont baisser progressivement mais doucement, laissant aux propriétaires lucratifs le temps de s’adapter à la situation. En contrepartie, l’Etat fournira à tous ces citoyens toujours plus de services gratuits et de temps libre à tout un chacun, propriétaires inclus. Des mesures fiscales de transition permettront un accompagnement qui ne laissera personne sur le carreau. Les propriétaires ne perdront pas de niveau de vie (ils y gagneront même) et les locataires auront, eux, accès à des logements gratuits ou à prix plus réduits pendant la transition.
Pierre-Alexandre Ponant
