LE SYSTEME CAPITALISTE CHERCHE A ENTRETENIR LES PROBLEMES ET PAS A LES RESOUDRE
Notre système tout entier, au sens économique, est basé sur des restrictions. La rareté et l’inefficacité sont les vecteurs de l’argent, plus il y a de ressources, moins vous pouvez facturer, et plus il y a de problèmes, plus il y a d’opportunités de gagner de l’argent. Ceci s’oppose au concept d’abondance dans l’économie basée sur les ressources, où les ressources sont mises à disposition gratuitement pour les citoyens. Expliquons ce concept d’abondance. Une chose est gratuite parce que l’on peut l’avoir à sa disposition sans contrainte.
Par exemple, l’oxygène est gratuit. Si demain l’air devient trop pollué, certains commenceront, comme en Chine, à vendre des bouteilles d’air pur. Si vous créez une ville avec des arbres fruitiers partout, à libre disposition, cette nourriture est gratuite, les lobbys agro-alimentaires ne pourront plus faire de business. Si vous créez une bibliothèque de prêt d’objets pour que les gens puissent emprunter librement une caméra, une guitare, une raquette de tennis ou une perceuse, cela fera moins de ventes pour les industriels. Si un malade déclare un cancer, cela génère du profit pour l’industrie du médicament. Si un produit est construit pour casser plus vite (obsolescence programmée), on gagne de l’argent pour le réparer ou en vendre un nouveau.
Il n’y a pas non plus d’intérêt à aider les gens à sortir de la pauvreté, car s’ils ont du mal à joindre les deux bouts, voire même, dans certains pays à se nourrir, ils seront prêts à travailler pour le salaire le plus faible possible pour tenter, tant bien que mal, de survivre. Dans certains pays comme le Burundi, la Somalie, la République Démocratique du Congo ou Madagascar, les gens qui travaillent et qui vivent dans l’extrême pauvreté constituent 70% de la population. Un travailleur pauvre de la RDC qui travaille dans les mines pour récolter des métaux précieux pour vos smartphones est une bénédiction en termes financiers pour les grands groupes technologiques, car ils peuvent faire plus de profits sur leurs produits. En France, un travailleur pauvre qui doit payer un loyer de 500 euros et nourrir ses enfants n’aura pas d’autre choix que d’accepter un travail qu’il déteste même si ce n’est payé qu’un SMIC, car il faudra qu’il survive. Son patron pourra faire une plus grosse marge sur la valeur qu’il produit réellement par rapport au salaire qui lui est donné.
En résumé, plus cela se passe mal, plus il y a de problèmes, moins les choses sont données gratuitement, et plus il y a d’argent à se faire. Les capitalistes n’ont pas d’intérêt à ce que cela aille mieux. Bien entendu, tout n’est pas comme cela dans le l’économie de marché, où il y aussi une part de service utile qui est rendu par les entreprises, mais ces niches entrepreneuriales sont déjà pour la plupart occupées et aujourd’hui on est plus confronté à un problème de statut quo dans de nombreux secteurs où l’on cherche à conserver et entretenir les problèmes pour continuer à vendre.
Cette réalité est une maladie sociale, car les gens peuvent en fait s’enrichir de la misère des autres et de la destruction de l’environnement.
L’efficacité, l’abondance et la durabilité sont les ennemis de notre structure économique, car elles sont inverses aux mécanismes nécessaires pour se perpétuer. Ceci est profondément essentiel à comprendre, car une fois que vous avez mis tout cela ensemble, vous commencez à apercevoir que le milliard de personnes qui meurent actuellement de faim sur cette planète, les bidonvilles sans fin, et toutes les horreurs d’une culture de la pauvreté et de la perversion ne sont pas dues à un ordre humain naturel ni à un manque de ressources terrestres. Ce sont les produits de la création, de la perpétuation et de la préservation artificielle de la rareté et de l’inefficacité.
Pierre-Alexandre Ponant
