Les fausses bonnes solutions pour sauver le monde : 5) La collapsologie et la frugalité

Beaucoup de mouvements dits “collapsologues” s’alarment de la raréfaction des ressources sur terre et des conséquences catastrophiques qui vont en découler. Cependant elles ne proposent pas de modèle alternatif pour pallier la raréfaction de ces ressources. Tant que nous critiquons sans apporter de solution nous resterons coincés face au rouleau compresseur qui avance. Certains proposent la mise en place individuelle ou politique d’une certaine forme de frugalité. En consommant moins, on respecterait ainsi plus les ressources de la planète. Cependant cette proposition est impossible à tenir structurellement dans le monde économique capitaliste. C’est comme demander à une goutte d’eau qui tombe de bien vouloir rester en suspension et de s’affranchir de la gravité. Elle tombera nécessairement – de manière physique et systémique.

Premièrement parce que cela fait appel à une notion de responsabilité individuelle, et on le voit avec les armes aux Etats-Unis et avec les déchets plastiques dans les océans, cela ne marche pas, l’impact sera toujours limité par une société qui elle pousse à la consommation avec le marketing et la necessité de vendre un produit pour vivre, car la notion de survie est toujours correllée à la vente d’un produit et d’un service. Aussi, parce que l’économie est organisée par les lois de la compétition et du profit. Par construction même, seules les entreprises “voyous” qui respectent ses règles survivent et parce qu’elles auront toujours des employés à exploiter. 

Imaginez que vous soyez un patron vertueux et que vous cherchiez à arrêter d’accumuler toujours plus de profits, et à consommer toujours plus de ressources pour y parvenir. Vous n’aurez plus de nouveaux actionnaires, donc moins d’argent dans vos caisses. Vous aurez moins de rendement que l’entreprise concurrente qui pourra se démarquer de vous grâce à un budget marketing plus important, ou qui pourra racheter vos activités. L’entreprise la plus grosse et la moins éthique survivra. Si vous voulez mieux payer vos salariés, l’entreprise concurrente qui les paye tout juste au SMIC fera plus de bénéfices que vous, et vous battra plus facilement sur le marché. Les entreprises voyous sont donc condamnées structurellement à pousser à la faillite les entreprises éthiques.

Certains rétorquent que le consommateur pourrait choisir les entreprises auprès desquelles ils consomment. Encore une fois, on tombe dans l’exemple de la goutte d’eau qui essayerait de s’affranchir de la gravité à cause de la mécanique de fixation des prix. Ces entreprises vertueuses qui voudraient éviter les paradis fiscaux, utiliser des produits de meilleure qualité et mieux payer leur salariés devront donc impacter ces coûts dans les prix de leurs produits. Mais tout le monde ne pourra pas se les payer. Pourquoi?

En face, on fixe les prix d’achats les plus hauts possibles par rapport à ce que les gens sont prêts à payer. Les propriétaires fixent le prix des biens immobiliers le plus haut possible par rapport à ce que les locataires sont prêts à payer, et ce sans aucun rapport à la réalité du coût de construction du logement. C’est la loi de l’offre et de la demande. Ce mécanisme fait que les citoyens payés au salaire minimal obtiennent – de manière systémique – un salaire qui leur permet de tout juste se nourrir, se loger et de s’acquitter des factures. Ils ne pourront donc pas avoir le privilège de choisir sciemment les produits plus chers de l’entreprise plus éthique. Ils n’en auront pas les moyens. Typiquement aujourd’hui, les ménages les plus modestes ne peuvent pas se permettre de faire leur course au Biocoop. C’est le serpent qui se mord la queue est on fait donc face à une impasse systémique.

Tant que les collapsologues proposeront des solutions dans le même schéma de pensée économique leurs actions resteront vaines. Ce qu’il faut c’est un changement de système économique qui ne fait pas appel à la responsabilisation individuelle en sortant d’un modèle économique basé sur le profit et la compétition.
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